Archives de catégorie : Artillerie & Fortifications

Fortifications & artillerie – Quelques réflexions à propos des peintures et marquages originaux

À l’aune de visites de fortifications ou d’études de pièces d’artillerie anciennes, j’ai été souvent frappé par le contraste entre l’énergie consacrée au « gros œuvre » — qu’il s’agisse de restaurer des pans de fortifications, une pièce d’artillerie et son affût, etc. — et la mauvaise qualité du rendu final qui correspond essentiellement au travail de mise en peinture.

C’est d’autant plus dommage que travail de restauration sous-jacent, souvent considérable, est mis à mal durant cette dernière phase. Pourtant la maxime bien connue « le diable est dans les détails » devrait conduire les restaurateurs à des réflexions plus abouties dans cette dernière phase, la plus visible !

Les mauvais exemples en la matière abondent… de la peinture de portes blindées style « porte de ferme » jusqu’à l’usage immodéré de la peinture noire à l’intérieur des ouvrages  et de la couleur « vert armée » des années 1970 pour des cuirassements du 19e. Pour y pallier, le remède est pourtant simple. Il correspond une approche systématisée et documentée, préalable obligé de toute restauration.

À cet effet, on peut s’appuyer utilement quelques éléments de base :

  1. De nombreux règlements qui apportent leur lot de précisions. Il convient bien évidemment d’en préciser le périmètre d’application dans l’espace et dans le temps. Ils ne peuvent toutefois pas donner une réponse à toutes les questions qui se posent… Il y a parfois un hiatus important entre le règlement et l’usage courant ;
  2. L’analyse de l’objet, préalable obligé avant tout travail de restauration ;
  3. L’étude de vestiges similaires bien conservés représente souvent un apport des plus précieux. C’est tout particulièrement vrai dans le domaine des fortifications où étude quelque peu attentive permet d’éviter nombre d’erreurs ;
  4. Enfin, une source majeure, trop souvent négligée car peut-être d’un accès plus difficile, correspond à l’usage des archives photographiques anciennes ou semi-récentes.

Suivant le type de restauration, certaines ressources seront bien évidemment plus accessibles que d’autres.

Nous ne ferons pas figurer dans ce billet des clichés de travaux moins réussis car il ne s’agit pas de stigmatiser. En revanche, nous illustrerons notre propos à l’aide de quelques clichés portant sur les fortifications et, parce qu’il s’agit d’un sujet assez similaire, les marquages des pièces d’artillerie antérieurs à 1914.

Fortifications…

Porte de Belfort — cliché original (nov. – déc. 1870) : noter les marques d’orientation peintes sur la façade du pavillon de la porte (© Fonds Balliet J.M.)
Porte de l’arsenal de Neuf-Brisach — Plus de 150 ans après… L’intitulé du bâtiment et les peintures d’origine française sont réapparues ! Un témoignage des plus précieux et probablement fortement menacé par une nouvelle mise en peinture. (© cliché Fonds Balliet J.M.)
Neuf-Brisach — Geschossladestelle I [G.L.St. I.] — La teinte de peinture grise d’un usage commun dans les fortifications allemandes du 18e est parfaitement conservée. Noter la numérotation de la serrure qui devait correspondre à celui de l’étiquette de la clé ! (© Cliché Fonds Balliet J.M.)

Et pour réaliser la transition entre fortifications & artillerie…

Mortier G de 270 mm Mle 1889 sur affût G à châssis circulaire Mle 1890 système Vavasseur. Batterie de côte, s.d. vers 1901  (© Fonds Balliet J.M.)

Exemples de marques sur les affûts de pièces d’artillerie françaises, période antérieure à 1914.


Mise en exergue de l’importance des sources photographiques originales…

Un cliché exceptionnel — une vue stéréoscopique s.d. vers 1855 — d’un canon obusier de 12 léger avec des marques peu réglementaires sur le caisson !  (© Fonds Balliet J.M.)
Quelques marquages apposés sur les affûts en 1870 ou peu après (© Fonds Dr Balliet J.M.)
Canon de 4 rayé de campagne Mle 1858 (système La Hitte). Sur la crosse de l’affût : « 13e Rt 11e Bie » Soit 13e Régiment d’artillerie de campagne, 11e batterie (© Fonds Balliet J.M.)
Canon de 155 C Mle 1890 de Baquet (© Fonds Balliet J.M.)

Canon de campagne de 75 mm Mle 1897. Classe 1901 – le 8 juillet 1905. Artillerie de la 6e division de cavalerie – 2e Régiment – 11e Batterie (© Fonds Balliet J.M.)

Canon de 155 C Mle 1904 TR Rimailho en position de route. « ART LOURDE 135 C Mle 1904 TR » & « 2e Regt 117 BATie Pce N° 1 »  (© Fonds Balliet J.M.)

Hier & Aujourd’hui : Vestiges du Westwall près de Sasbach am Kaiserstuhl

Le château de Limburg, situé a proximité de la commune de Sasbach am Kaiserstuhl, domine le Rhin d’une hauteur de près de 40 mètres. Durant la période de 1939-1940, elle offrait aux Allemands un point de vue idéal sur la plaine d’Alsace et, plus important, sur le dispositif défensif français au droit d’un point de franchissement… Un poste d’observation, aujourd’hui encore conservé, avait même été creusé dans la falaise !

Plusieurs vestiges des ouvrages défensifs allemands — le fameux Westwall — existent encore dans ce secteur mais, aujourd’hui comme hier, le Limburg offre surtout un point de vue remarquable après une petite ballade.

Actuellement… 1941

Vestiges d’une casemate allemande proche des berges du Rhin
Entrée d’une galerie d’observation creusée dans le roc

Fortifications de Strasbourg. Kriegstor II — Porte de guerre n° 2

S’il est un lieu bien connu des Strasbourgeois adeptes du jogging, les fortifications de l’enceinte urbaine construites à l’époque allemande (Kernumwallung) entre 1876 et 1882 sont encore largement méconnues bien que récemment mises en valeur.

Strasbourg - Kriegstor Nr. 2
Strasbourg – Kriegstor Nr. 2
Caponnière

La partie conservée est située à l’ouest de la gare de Strasbourg et comprend les bastions 14,15 et 16. Cette enceinte prend la forme d’une importante masse de terre habitée par des casernes et des poudrières. Son sommet forme un parapet aménagé en plateforme d’artillerie et agrémenté de nombreuses traverses-abris. Ce rempart est précédé d’un fossé en eau encore conservé et d’un glacis aujourd’hui remplacé par… une voie rapide.
Entre les bastions 14 et 15, l’enceinte est percée par la porte de guerre n°2 aujourd’hui réhabilitée

Strasbourg - Kriegstor Nr. 2
Strasbourg – Kriegstor Nr. 2
Gorge de l’ouvrage

 

Strasbourg - Kriegstor Nr. 2
Strasbourg – Kriegstor Nr. 2
Porte intérieure (porte charretière)

 

Strasbourg - Kriegstor Nr. 2
Strasbourg – Kriegstor Nr. 2
Barre de contre-appui de la porte extérieure
Strasbourg - Kriegstor Nr. 2
Strasbourg – Kriegstor Nr. 2
Caponnière
Strasbourg - Kernumwallung - Bastion 15
Strasbourg – Kernumwallung – Bastion 15
Caponnière cuirassée - Bastion 15 (état 2016)
Caponnière cuirassée – Bastion 15 (état 2016)

 

Fort Chapus [Fort Louvois]

Fortifications littorales — Les défenses de Rochefort

Fort Chapus (Fort Louvois)

À l’occasion d’un récent voyage en Charente-Maritime et en Bretagne, nous avons pu découvrir nombre de sites, souvent de grande qualité, dont le Fort Chapus (connu également sous le nom de Fort Louvois).

Cet ensemble, d’une architecture bien particulière, est situé entre l’île d’Oléron et le bassin de Marennes bien connu pour ses productions ostréicoles.

Le fort est bâti en 1691 sur les instructions de Louvois sur un rocher de la pointe de Chapus qui l’isole parfaitement du continent à marée haute. Il vient appuyer la citadelle d’Oléron et permet ainsi d’interdire l’accès sud de l’estuaire de la Charente aux vaisseaux ennemis se dirigeant vers Rochefort.

Sa construction fut d’ailleurs l’occasion d’un conflit entre l’ingénieur en charge du projet initial, Ferry, et Vauban qui avait été laissé dans l’ignorance de ce projet. C’est le Louis XIV lui-même qui tranchera ce différend sans prendre parti ni pour l’un, ni pour l’autre !

Fort Chapus (Fort Louvois)
Fort Chapus (Fort Louvois)

Achevé en 1694, le fort se présente sous la forme d’un fer à cheval formant une batterie basse au sein duquel sont disposés un donjon formant un réduit central ceint d’une douve, une caserne centrale, corps de garde ainsi qu’une poudrière à l’épreuve. Réarmé en 1875 après quelques modifications et réparations, l’ensemble a été fortement endommagé en 1945. Remarquablement restauré, ce site s’offre entièrement au visiteur en lui permettant la découverte d’un ensemble fortifié remarquable et proposant un point de vue panoramique sur l’île d’Oléron.

Fort Chapus (Fort Louvois)
Fort Chapus (Fort Louvois)

Fort Chapus (Fort Louvois) — Le front de gorge à marée basse [cliché Balliet J.M., 2009]
Fort Chapus (Fort Louvois) — Le front de gorge à marée basse [cliché Balliet J.M., 2009]
Fort Chapus (Fort Louvois) — Douve interdisant l'accès au donjon [cliché Balliet J.M. 2009]
Fort Chapus (Fort Louvois) — Douve interdisant l’accès au donjon [cliché Balliet J.M. 2009]

Fort Chapus (Fort Louvois)
Fort Chapus (Fort Louvois)

Le silence cartographique de Vauban – G. Monsaingeon

Reprise d’un billet toujours d’actualité mais publié, en 2008, sur un support maintenant obsolète…

Un petit tour rapide nous a permis de découvrir un article d’une haute tenue et d’un grand intérêt proposé par Guillaume Monsaingeon, auteur, entre autres, de l’ouvrage Les voyages de Vauban… À découvrir & à lire dans la collection Textimage.

Il aborde, d’une manière claire et élégamment illustrée, le travail cartographique de Vauban. L’ensemble est disponible dans son intégralité sur Internet.

Réf. : MONSAINGEON (G.) – Les voyages de Vauban. Paris, Editions Parenthèse, 2007.

Bien cordialement

Balliet J.M.

Un livre, un jour… VAUBAN – Le directeur général des fortifications

Dans son mémoire intitulé « Le directeur général des fortifications », rédigé en 1680, Vauban définit les tâches de chaque responsable. Ce mémoire fait rapidement l’objet d’une première édition pirate en Hollande dès 1685 (éd. Van Bulderen) qui semble avoir été promptement épuisée. Elle est rapidement suivie par une seconde édition proposée par Mœtjens dès 1689.

VAUBAN (Sébastien le Prestre de) - Le directeur général des fortifications par Mosr. de Vauban, Ingénieur général de France, &c. Seconde édition revûē et corrigé. La Haye, Arian Moetjens, 1689.
VAUBAN (Sébastien le Prestre de) – Le directeur général des fortifications par Mosr. de Vauban, Ingénieur général de France, &c. Seconde édition revûē et corrigé. La Haye, Arian Moetjens, 1689.

Dans son épitre dédicatoire, il la justifie comme suit : « Ce petit traité, que je prends la liberté d’offrir à votre altesse sérénissime a voulu paraître il y a quelque temps dans une ville voisine de cet état; mais le grand crédit de l’auteur sans la permission duquel il prétendait se produire en public, plutôt la crainte que l’on conçût que les étrangers en profitassent, l’a fait incontinent (sic.) disparaître. Si bien qu’il a été obligé de chercher ailleurs que dans sa patrie la liberté de se faire voir. […] ».

Cet ouvrage se divise en deux parties. Dans la première, Vauban définit l’organisation par subordination hiérarchique des ingénieurs et détaille les compétences et les tâches de chacun. Il détaille plus particulièrement les fonctions suivantes : directeur général, intendant des fortifications, ingénieur ordinaire, ingénieurs en second, conducteurs et chasse-avants (inspecteurs commis dans les grands ateliers pour diriger les ouvriers, faire marcher les chariots). La seconde partie présente un caractère plus technique : toisé, estimation des dépenses, devis et marchés.

VAUBAN (Sébastien le Prestre de) – Le directeur général des fortifications par Mosr. de Vauban, Ingénieur général de France, &c. Seconde édition revûē et corrigé. La Haye, Arian Moetjens, 1689.

Artillerie & Fortifications… le blog renouvelé !

Bonjour,

À la suite de notre blog antérieur qui utilisait des outils maintenant obsolètes, nous avons retenu pour cette nouvelle mouture un logiciel éprouvé… WordPress qui, je l’espère, saura vous donner satisfaction.

Dans un premier temps, nous reprendrons des articles plus anciens afin d’en assurer la pérennité… Viendront bien évidemment se greffer probablement de manière mensuelle quelques nouveautés.

Bien cordialement à tous.

Dr Balliet

Dessin Ms. plume et lavis. Fonds Balliet J.M.
Dessin Ms. plume et lavis — Fonds Balliet J.M.
[MANUSCRIT XVIIIe – FORTIFICATIONS] – SAUVEUR (Joseph) – Traité des fortifications. S.d. (vers 1710) ; in-folio