Page 5 - Neuf-Brisach -balliet-2017
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Artillerie & Fortifications
un canal de dérivation reliant le canal Vauban à la rigole de Widensolen. Ces modestes obstacles aquatiques suffisent à gêner la manœuvre et empêcher un franchissement aisé par les lourdes pièces d’artillerie de siège en usage à l’époque. Pus tardivement, la construction du canal du Rhône au Rhin (première moitié du XIXe) vient flanquer le front Est d’un nouvel obstacle aquatique. Lors d’un investissement, les communications de l’adversaire seraient rendues plus difficiles par la présence ces larges coupures humides. Seul le front nord est dépourvu d'obstacles significatifs. Vauban ne s’y est pas trompé et y voyait même un avantage : un front plus faible, mais bien connu du défenseur, devait attirer l’adversaire et faciliter ainsi la défense. Ce sera le cas en 1870 ! À l’opposé des concepts architecturaux dont le caractère symétrique est prégnant, la situation tactique de Neuf-Brisach est résolument asymétrique.
Principes architecturaux militaires propres à la place de Neuf-Brisach.
Il n’est pas dans notre propos de procéder à une description architecturale détaillée de l’ensemble de la place ou de ses bâtiments. Nous nous contenterons de décrire les différentes enceintes associées aux deux types de fronts rencontrés à Neuf-Brisach4 tels qu’ils se présenteront jusque dans les années 1870.
‣ L’enceinte de sûreté est à plein revêtement. Elle comprend à chaque saillant une tour bastionnée mais dont le propre est d’être exclusivement dédié au flanquement des fossés. Entièrement soustraite aux vues de l’ennemi, elle ne peut être battue d’aucun endroit si ce n’est d’un bastion adjacent. Les longues courtines sont elles-mêmes bastionnées et les casemates ainsi formées prennent le nom de petits flancs de courtine5. Il s’agit d’obtenir un meilleur flanquement par le canon de ces courtines inhabituellement longues. L’intérêt est pourtant moins militaire qu’économique car de longues courtines permettent d'augmenter le périmètre de la place à moindres frais alors que classiquement, pour une même surface, il aurait fallu construire un nombre bien plus élevé de tours bastionnées et de dehors fort onéreux. En augmentant la longueur d’un front sans l’affaiblir, Vauban fait ici preuve d’une remarquable forme d’intelligence économique.
‣ L’enceinte extérieure, dite de combat, est formée de différents dehors aux fonctions bien distinctes. Le périmètre extérieur est constitué par un chemin couvert et des demi-lunes dont la fonction première est de défendre le glacis au moyen de feux d’infanterie. Le chemin couvert à crémaillère dispose de traverses destinées à protéger les troupes contre les feux d’enfilade dont les redoutables tirs à ricochets. Ces traverses peuvent être utilisées comme parapet et prolonger la défense du chemin couvert. Des places d’armes rentrantes y sont disposées qui permettent la concentration des troupes destinées à l’habiter6. Huit
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Neuf-Brisach. C’est méconnaître la réalité de Neuf-Brisach.
Dans la littérature contemporaine, ancienne et actuelle, il est souvent fait mention d’un front de type
BELIDOR (Bernard Forest de) - La Science des ingénieurs dans la conduite des travaux de fortification et
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d'architecture civile. Paris, 1729.
Souvent et surtout indûment, figurent sur les plans et le front type de Neuf-Brisach des places d’armes
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saillantes.
Balliet J.M. - La place forte de Neuf-Brisach au XVIIIe.
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Fonds Dr Balliet — Colmar


































































































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