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Un livre, un jour… Les fortifications de Vienne au 16e s. — Wien als Festungsstadt im 16. Jh.

OPLL F., KRAUSE H., SONNLECHNER CWien als Festungsstadt im 16. Jahrhundert. Zum kartografischen Werk der Mailänder Familie Angielini. Böhlau, 2017.


Si, pour nombre d’entre vous, hormis quelques spécialistes en fortifications particulièrement pointus et germanophones de surcroît, les fortifications de Vienne peuvent ne présenter que peu d’intérêt, vous auriez peut-être tort au regard de la richesse de cet ouvrage.


En effet, les fortifications de Vienne opèrent une profonde mutation sous la pression conjuguée des Turcs et des évolutions de l’architecture militaire. Sous l’influence des ingénieurs italiens par mi les plus célèbres, une imposante enceinte bastionnée va désormais défendre Vienne.


D’autres ingénieurs y feront également une apparition. C’est, plus particulièrement, le cas de l’ingénieur strasbourgeois Specklin (i. e. Speckle) dot l’influence sur les fortifications de l’espace germanique sera importante. À ce propos, les auteurs corrigent un certain nombre d’idées qui révèlent in fine erronées sur le rôle de Specklin à Vienne… Si Fischer (in FISCHER A. – Daniel Specklin aus Strassburg (1536-1589). Festungsbaumeister, Ingenieur und Kartograph. Sigmaringen, 1996) lui attribue un rôle actif et important, ce n’est de facto pas le cas. Cependant Specklin tire certainement de son séjour prolongé à Vienne de nombreux enseignements et apporte, par ses écrits, un témoignage de première main particulièrement précieux ! Pour ceux qui s’intéressent au célèbre ingénieur strasbourgeois, cet ouvrage un complément bienvenu !


Enfin, la qualité des illustrations, un texte fouillé, de nombreux développements à propos des ingénieurs italiens de l’époque et de nombreuses annexes particulièrement fournies m’amènent à recommander cet ouvrage sans réserve.


Bien cordialement.


JMB

Un modèle d’architecture militaire autrichien : Forte Ardietti (Lagerwerk VI) — Place de Peschiera

Le quadrilatère lombard — formé par les forteresses de Peschiera, Mantoue, Legnago et Vérone — est compris entre les fleuves Mincio, Pô et l’Adige. Il réalise le cœur du système défensif de l’Italie du nord constitué par Napoléon durant les guerres de l’Empire. Difficiles à contourner, elles empêchent le mouvement des troupes ennemies dans la plaine du Pô et, sans surprise, ce quadrilatère sera repris, à partir de 1815, par les Autrichiens.

La campagne d’Italie menée par Napoléon III (1859) démontre le caractère obsolète des fortifications bastionnées. À l’aune de ces expériences désastreuses, les Autrichiens renforcent considérablement leur système défensif : une ceinture de forts détachés, peu éloignés les uns des autres vient renforcer la défense des villes du quadrilatère. Vérone compte alors parmi les places fortes les plus importantes d’Europe. Par ailleurs, les débouchés des vallées telle que celle de l’Adige sont barrés de nombreux forts (Rivoli…) auxquels vient s’ajouter le camp retranché de Pastrengo pour couvrir la route menant de Vérone à Peschiera.

Si la conception du fort date de 1853 avec un début de construction dans les années 1856-56 interrompu par le conflit de 1859, les travaux ne reprendront qu’en 1860 avec quelques modifications mineures.

Il s’inspire directement des concepts de la fortification polygonale initiés par Montalembert qui, injustement décrié en France, rencontre un grand succès dans l’espace germanique.

  




Le fort Ardietti (anc. Lagerwerk VI durant la période autrichienne) a été construit en deux temps :

  • Tout d’abord les remparts extérieurs — plateformes d’artillerie —, le mur à la Carnot flanqué par trois caponnières et une casemate couvrant la gorge de l’ouvrage.
  • Ultérieurement, un réduit central de forme presque circulaire complète le dispositif.

Vol du 8 mai 2017 avec l’aimable autorisation de l’association gestionnaire du site… 

Il s’agit du fort le plus important de la place ! Il peut abriter une garnison de plus de 600 hommes et armé de 25 pièces d’artillerie dont 4 pièces modernes (pièces rayées à chargement par la culasse du système Wahrendorf.

En 1866, il passe entre les mains italiennes pour être in fine transformé en dépôt de munitions vers la fin du premier conflit mondial.


Par ailleurs…


Un remerciement très chaleureux tant pour l’immense qualité de l’accueil que pour la disponibilité des membres de l’association qui entretiennent et animent le Forte Ardietti avec amour.


Un ricevimento di ringraziamento qualità caldo e la disponibilità dei membri che mantengono e animano il Forte Ardietti brillantemente.


Balliet J.M.


Le camp retranché de Pastrengo (Vénitie, Italie)

Forte Degenfeld – Escarpe.

En 1859, à la fin de la Seconde Guerre d’indépendance et l’armistice de Villafranca suite, la province de Vérone devient une région frontalière : la Lombardie a été cédée au Royaume d’Italie alors que la Vénétie reste sous le contrôle de l’Autriche.

Cette dernière construit des môles fortifiés — des sortes de camps retranchés — autour de Rivoli (sud de la vallée de l’Adige), Peschiera (sud du lac de Garde) et Vérone.

Le secteur de Pastrengo, situé à l’est de Pechiera, comprend une série de collines dont la situation permet de contrôler la route menant de Vérone au lac de Garde, le débouché de la vallée de l’Adige, la rive droite du lac de Garde et de flanquer l’importante forteresse de Vérone sur son flanc ouest.

Forte Degenfeld – Cour intérieure

C’est la raison pour laquelle, les Autrichiens construisent quatre forts — Degenfeld (Piovezzano),  Benedeck (Monte Bolega), Nugent (Poggio Pol), Leopold (Poggio Croce) — complétés par un télégraphe optique permettant une liaison avec Pechiara et Vérone.

Les travaux débutent au mois de juin 1861. Menés à bon train, ils ne dureront que cinq mois ! Les quatre forts ont été conçus selon les schémas de deux ingénieurs : le colonel Andreas Tunkler et le major Daniel Salis Soglio.

Vue aérienne prise du Forte Nugent en direction du Forte Leopold et de la tour du télégraphe optique.


D’une forme est grossièrement polygonale, ces forts constituent suivant les usages de l’époque une vaste plateforme d’artillerie. Ils ont été construits à l’aide de pierres blanches extraites localement, une forme d’esthétisme apparaît comme une constante. Le sommet rempart, dont l’accès se réalise au moyen de rampes d’artillerie, comprend des banquettes d’artillerie et de traverses. Le massif du fort est ceint d’un fossé en général étroit et peu profond dont l’escarpe et la contrescarpe sont revêtues. L’escarpe est munie de créneaux de fusillade. Le fossé est protégé par une série de coffres de contrescarpe reliés entre eux par une galerie de contrescarpe. Un passage souterrain permet de relier la galerie de contrescarpe au massif du fort. On trouve en outre toutes les dispositions classiques d’un fort pour abriter une garnison d’environ 80 hommes. La collecte des eaux pluviales permettait d’alimenter une citerne.

Après l’annexion de la Vénitie au Royaume d’Italie, ils perdent toute valeur militaire et ne sont plus utilisés que comme des entrepôts du XXe siècle.

Forte Degenfeld (Forte Piovezzano)

Forte Degenfeld — Vue aérienne

Disposé sur une colline surplombant la ville de Piovezzano, il porte initialement du général Degenfeld, un ministre autrichien de la guerre. De forme trapézoïdale, il est orienté vers l’ouest en direction du Lac de Garde. Sur le rempart, il y avait des positions d’artillerie protégées par un mur tandis que d’autres fonctionnaient dans le blockhaus. Outre les positions d’artillerie disposée sur le rempart et tirant à barbette, on trouve également une casemate d’artillerie. En 1866, l’armement était constitué de 12 canons dont 6 pièces rayées. À noter que le logement construit sur le rempart n’est évidemment pas contemporain et de main civile.

Enfin, si le front de gorge est fermé par un rempart relativement mince muni de créneaux de fusillade et d’une classique caponnière double assurant le flanquement de ce front.


Vue aérienne (vidéo – mai 2017)…



Galerie de clichés


Forte Nugent (Poggio Pol)

Forte Nugent (Poggio Pol) aujourd’hui transformé en restaurant. Les fossés ont été comblés, la caponnière de liaison (au premier plan) transformée en sortie annexe !

Forte Leopold (Poggio Croce) 

Assez bien conservé, à l’instar de son homologue, le fort Nugent, il connaît aujourd’hui un nouvel usage comme lieu de restauration. 

Orientation bibliographique

  1. [ARCHIV FÜR ARTILLERIE- UND INGENIEUR-OFFIZIERE – 1876] – NEUMANN (General Lieutnant von), SCHRÖDER (Generalmajor) – Archiv für die artillerie- und Ingenieur-Offiziere des deutschen Reichsheeres. Berlin, 1876.
  2. BORNECQUE (Capitaine J.), BLASEK (Major du Génie autrichien) – Examen du système de fortification dans les principales puissances de l’Europe. Paris, 1882.
  3. BRUNNER (Moriz, Ritter von) – Leitfaden für den Unterricht in der beständigen Befestigung. Zum gebrauche für die k. k. Militär-Bildungsanstalten, Kadetten-Schulen, dann für einjährig-Freiwillige. Vienne, 1880.
  4. MENEGHELLI (F.) – Verona un territorio fortificato. s.l., 2011.
  5. MÖRZ DE PAULA (Generalmajor K.) – Der Österreischisch-Ungarische Befestigungsbau 1820-1914. Vienne, 2006.
  6. SCHEIBERT & PORTH (Kgl. Pr. Major z. D. – k. und k. österr. Oberst) – Illustriertes MILITÄR-LEXIKON für die k. und k. österreichisch-ungarische und deutsche Armee. Berlin, 1897.

Ainsi que… www.bussolengo-vr.it